Je n'avais rien posté ici depuis mai, je n'étais
Je n'avais rien posté ici depuis mai, je n'étais pas revenue là bas depuis juin...
J'attendais le premier coup de vent de l'automne. Un avis de Grand Frais, un dimanche d'octobre. Une marée basse pour quelques danses sous la pluie, face au vent.
A cette époque, il n'y a plus trop de monde dans cette partie de l'île que les sudistes boudent hors saison car trop éloignée du pont qui (hélas) relie Ré au continent. Le site n'était pas désert comme en hiver mais aucun intrus malvenu pour troubler mes retrouvailles avec le premier grand phare de ma vie...
Je ne m'étais pas enfuie comme une poursuivie jusqu'au ciel, ce qui ne veut pas dire que je n'aime plus mourir au sommet des géants de lumière. C'est juste qu'il faut savoir rendre hommage aux gardiens de phares... ;)
Le vent rend fou seulement ceux qui ne le sont pas déjà! Des rafales salées d'environ 37 noeuds s'engouffraient dans ma tête. Cheveux humides et gorge offerte pour que tout soit parfait.
Vue sur la Vieille Tour mais aussi sur un début de phénomène naturel appelé croix de mer, cross sea ou tout simplement "vagues carrées". Quand toutes les conditions sont réunies (houle de sud ouest croisée avec celle du nord), l'océan prend la forme d'un damier.
Le phare des Baleineaux est l'un des premiers phare automatisé... Il signale avec Les Baleines la pointe nord de l'île mais surtout les dangers de la barre rocheuse (haut banc du Nord) située entre eux. C'est aussi un séchoir à cormorans...
A coté, pas loin, le hangar de l'ancien canot de sauvetage. Quand j'étais gamine, j'étais persuadée que c'était le sanctuaire de l'âme de La Raynelle (une vieille sorcière pilleuse d'épaves). Aujourd'hui encore, puisqu'elle ne peut être ailleurs.
Plus tard, vers Ars.
Ça fait maintenant plus de quatre ans que cette balise américaine (contrairement à nous, les balises tribord sont rouges aux États-Unis) s'est échouée sur la plage du Jard. Forcément, je m'y suis (r)attachée...
Cette photo a été prise en février dernier par l'Ami fou allié... Après une nuit presque blanche à pédaler d'ébriété en état de rire entre le Lisay et Trousse-Chemise.
Elle est énorme, ses six tonnes ne craignent pas mes quelques kilos!
Depuis la rentrée, l'équipe fait face à une "période de turbulence" annoncée par notre direction. Nous accueillons sur notre structure deux jeunes qui ne relèvent absolument pas de notre prise en charge. Le premier est un "psychopathe qui décompense", le second un P.A.G (Projet d'Accompagnement Généralisé) qui sème la terreur partout où il passe. L'un se prend pour Nordahl Lelandais nous menaçant (ainsi que nos familles) des pires sévices, l'autre bouffe des animaux vivants quand il ne cherche pas à dépecer des humains. J'ai toujours mieux su gérer les troubles du comportement des autres que les miens, mais là... Bref, je pense souvent à Tim qui pourrit au fin fond d'un hôpital psychiatrique. C'est jamais bon...
J'avais des heures, j'avais des jours. Je venais de poser une semaine et un jour, abandonnant les enfants des autres pour me rendre disponible auprès des miens en l'absence du neurotypique qui ne se décourage toujours pas de vivre à coté de moi...
Les yeux (re)posés sur l'horizon, j'apercevais Hoover, Tina, Mickey, Ralf et Harold. De tous les livres d'Howard Buten, "Mr Butterfly" est celui vers lequel je reviens le plus souvent.
Quand j'ai "mal à mon boulot", Hoover me rappelle combien je les aime. Quand Howard me manque, je pleure avec Buffo. Etc...
Plus tard, le long des remparts de St Martin rendus à ceux qui y vivent à l'année. Derrière le phare de la Barbette, les côtes vendéennes, la Faute et la Tranche s/Mer...
Imaginer l'espace de quelques instants...mon évasion à bord du berceau de Moïse!!! Allez hop, je plaque tout foudroyée par une prise de conscience sans retour, je me tire abandonnant le confort de ma vie toute dorée derrière moi.
C'est souvent la voix de Tim que j'aime entendre dans ces moments là. Il hurlait "Arrête ça tout de suite!!!" juste avant de faire une grosse connerie. Ça faisait marrer ceux qui ne brandissaient pas leur droit de retrait.
St Martin est réputé pour son glacier mais j'avais faim d'une bonne crêpe sucrée au beurre salé, froid d'un double café chaud dans un recoin de bistrot presque désert.
Marée haute...
Aux quatre coins de l'île, on trouve les baleines de Nute peintes sur les digues, rochers, remparts, palissades etc... Comme celle-ci sur la pointe de Chauveau. Ça en fait gueuler quelques-uns qui feraient mieux de dépenser leur énergie pour sauver ce qui peut encore l'être sur ce qui reste de notre planète.
Les nuits de boucaille, je m'endormais bercée au son de la corne de brume du phare de Chauveau ou bien celle de la balise Richelieu selon les vents. C'était mieux avant, les cornes ne meuglent plus à présent.
Loin derrière, on aperçoit le phare à deux tours de l'île d'Aix. Le bagnard était visible aussi ce jour là.
Les oiseaux limicoles, les petits mignons de l'estran. Principalement des tournepierres à collier, bécasseaux sanderling mais aussi quelques gravelots, parfois un vol d'huitriers pie, mouettes et goélands omniprésents...
Quand mon chien est avec moi, il fait fuir TOUS les animaux. Que ce soit à l'océan, dans les bois et forêts, les marais, partout... Son instinct de chasseur ruine toutes mes tentatives d'apprentissage. Parfois je l'engueule, parfois je rigole, souvent les deux à la fois. Plus rarement aussi, j'ai peur. Jamais pour les animaux, toujours pour nous.
Sablanceaux... Marée descendante...
L'humain a tourné la tête dans ma direction plusieurs fois, heureusement que j'étais invisible sinon il m'aurait vue...
Après la tragédie du pont Morandi, celui de Ré s'est mis à semer la psychose populaire début septembre lorsque l'un des douze câbles de précontrainte (il y a un mois j'ignorais ce que c'était) s'est rompu. En attendant les réparations, toutes les précautions sont prises, contrôles journaliers, restrictions et modifications de circulation etc... Le pont d'Oléron aussi se dégrade, il suffit de passer dessous pour s'en apercevoir.
Purée, si seulement nos îles pouvaient redevenir des îles...
Nute encore pour finir en couleur et aussi parce que j'aime ses gentilles baleines qui militent pour la sauvegarde des espèces naturelles...
"Save the big fat whales!!!"
Et alors il fallait commencer à penser à rentrer... Quitter l'île sur laquelle j'avais vécu deux marées supplémentaires.
Rentrer? Bien sur, mais pas directement. L'envie d'aller embrasser mes parents dans ma maison pour toutes les fois où je ne pourrai plus le faire, le besoin d'aller traîner sous les lumières du port pour toutes les fois où je l'ai fait...
Rentrer? Bien sur mais avec dans mon horizon déjà, la promesse d'une prochaine récompense surpuissante... Celles qui me permettent de supporter mon existence qui supporte pas d'être là...sans ça. Cette fois, c'était le concert tant attendu du grand Thiéfaine à l'Arena. D'autres, je pars seule sans forcément trop m'éloigner puisqu'il me suffit d'atteindre l'océan pour me sentir loin de tout. Quelques kilomètres, une chambre d'hôtel en "si besoin"... Belle-Île cet hiver, consolation éternelle...
Et comme ça, je vais. Mi fugue, mi raison...
BERTRAND CANTAT SOULEYMANE DIAMANKA DANSEZ SOUS LA TEMPETE 2011